Dans la nature, la notion de déchet n’existe pas : les déchets des uns sont les matières premières des autres. Et si l’homme en prenait de la graine ? Dans l’exposition Nature 2.0 qui ouvre ses portes le 31 mars 2018, découvrez quelques exemples d’innovations où le déchet devient une ressource.
Dans la nature, la notion de déchet n’existe pas : les déchets des uns sont les matières premières des autres. La matière organique générée par les producteurs est mangée par les consommateurs. Les décomposeurs dégradent les matières organiques mortes et synthétisent les éléments minéraux. C’est un cycle perpétuel !
Pour reconsidérer notre rapport à l’environnement, de plus en plus d’entrepreneurs et d’entreprises s’intéressent à intégrer nos consommations à un écosystème : c’est le principe de la production en économie circulaire ou « Cradle-to-Cradle ».
Pour l’exposition Nature 2.0, le Pass a collecté de nombreux objets, inspirés pour certains de procédés anciens, et qui participent à cette démarche de valorisation des « restes ».
Du déchet à la ressource : s’habiller de lait périmé
L’homme transforme le lait en matière solide depuis longtemps. En 1893, Auguste Trillat, un scientifique français, découvre qu’on peut transformer la caséine, la protéine présente notamment dans le lait de vache, en une matière solide, une forme de plastique. Ce matériau, nommé Galalithe, est très utilisé au début du XXe siècle, pour fabriquer des boutons et d’autres petits objets. Pour certains, la Galalithe est une alternative très économique à l’ivoire. Le matériau cesse cependant d’être utilisé massivement après les années 30 : petit à petit, le plastique issu de la pétrochimie devient le matériau par excellence pour fabriquer de petits objets.
La caséine connaît aujourd’hui un regain d’intérêt. L’utilisation du lait périmé, devenu impropre à la consommation, est une piste pour limiter nos consommations de pétrole.
Le textile issu de la caséine a été très utilisé dans les années 30 et durant la seconde guerre mondiale, comme alternative à la laine, puis abandonné, le processus de fabrication de l’époque étant considéré comme couteux et complexe. Au début des années 2010, une biochimiste allemande, Anke Domaske, commence à s’intéresser à ce matériau, avec comme premier objectif la recherche d’un tissu hypoallergénique. Les technologies et connaissances modernes permettent à Anke de créer une fibre naturelle en utilisant peu d’additifs dans le processus de transformation de la caséine en fibre. Elle fonde Qmilk en 2011 et remet au goût du jour un matériau qui avait été délaissé. Aujourd’hui, on peut se procurer de la fibre de lait assez facilement et quelques grandes marques de vêtements l’utilisent. Au toucher, elle est parfois comparée à la soie pour sa douceur. La fibre de lait a pour avantage de donner un usage au lait périmé, d’avoir des propriétés hypoallergéniques, antistatiques, antibactériennes, ce qui en fait un matériau de choix dans le milieu médical et paramédical ; c’est aussi un matériau naturel et biodégradable !
Pour l’emballage, l’alternative du plastique à partir de protéine de lait
Environ 320 millions de tonnes de déchets plastiques sont produites annuellement par l’homme à une échelle mondiale et seulement 5% sont recyclés… Une partie du plastique que nous utilisons pourrait être remplacé par des bioplastiques naturels et biodégradables. La Galalithe du début du XXe siècle inspire aujourd’hui certains chercheurs.
L’entreprise française Lactips fabrique un bioplastique à partir de protéine de lait (impropre à la consommation). Ce matériau est biodégradable et soluble dans l’eau. Dans un environnement sec, c’est également une barrière à l’oxygène. Il permet aujourd’hui de remplacer les emballages des pastilles de lessive ou de produit vaisselle, par exemple. Ses propriétés permettent aussi de développer le premier film plastique comestible pour demain.
Imaginons le déjeuner du futur : on ne jettera plus son sachet de céréales, puisqu’il sera dissous dans le lait ! »
Les drêches de bière font de délicieux crackers!
Une grande partie des plantes cultivées à des fins alimentaires ne sont pas utilisées dans leur intégralité. En effet, l’homme ne consomme en général que la partie comestible et/ou gustative des plantes qu’il cultive. Les parties restantes de ces plantes sont presque toujours compostables, biodégradables…. Mais pourrait-on valoriser autrement ces « déchets » ?
Par exemple : que deviennent l’orge et le blé transformés en malt, une fois la bière brassée? Si la bière est produite de manière artisanale, fabriquer 1000 litres de bière génère 300kg de drêches – c’est ainsi qu’on appelle les résidus de céréales après qu’on en ait tiré le jus de brassage. Deux françaises, Marie Kerouedan et Nathalie Golliet, ont eu l’idée, à l’issue d’un stage de fabrication en brasserie artisanale, d’utiliser ces « déchets de brasserie » pour fabriquer des crackers à base d’orge malté. Aujourd’hui, Résurrection fabrique des crackers bio en récupérant les drêches de brasseries situées en régions Île-de-France et Nouvelle Aquitaine.
Après tout, pourquoi se contenter de boire le jus des céréales, quand on peut manger les restes ?
De l’ananas à la chaussure
Une partie des plantes que nous consommons sont composées de fibres, qui peuvent être utilisées comme base pour la fabrication de textile.
Dans certains pays, le bananier est depuis longtemps utilisé pour ses fibres, pour servir de base au papier ou à des matières textiles. C’est le cas aussi du bambou.
En s’inspirant de techniques séculaires, on crée aujourd’hui des tissus résistants à partir de ces plantes. Dans Nature 2.0, vous pourrez voir un étonnant sac fait à partir de textile de bananier !
D’autres déchets de la production de fruits sont utilisés aujourd’hui pour fabriquer du textile.
Si le cuir est encore largement d’origine animale, on peut aujourd’hui également transformer les végétaux pour leur donner un aspect similaire. Le Piñatex ® est un matériau fait à partir des fibres de feuilles d’ananas. C’est une alternative durable aux cuirs naturels d’origine animale et aux cuirs synthétiques issus de la pétrochimie. La société qui fabrique ce matériau, Ananas Anam, applique les principes « cradle to cradle » et s’inscrit dans une démarche de développement des communautés locales aux Philippines.
Dans Nature 2.0, vous découvrirez une chaussure fabriquée dans ce matériau par la marque portugaise Po-Zu.
Ré-utiliser les déchets dans la construction
A quoi ressemblera la maison de demain ? L’habitat est au cœur des problématiques de développement durable aujourd’hui … En réfléchissant aux matériaux utilisés pour construire nos maisons, nous pouvons réduire notre impact sur l’environnement. Le sable, largement utilisé pour être transformé en béton ou en ciment, est une ressource limitée puisqu’il faut un temps très long à la nature pour en recréer.
Pourquoi ne pas chercher dans les déchets la base de matériaux de construction ? À Marcq-en-Barœul, dans le nord de la France, et à Venlo, aux Pays-Bas, deux entreprises, EtNISI et StoneCycling, fabriquent des briques et des carreaux de carrelages bien particuliers. En collectant et en compressant des déchets issus de l’industrie du bâtiment et de l’industrie agro-alimentaire, ces deux entreprises créent des matériaux qui ont l’avantage d’être aussi écologiques que décoratifs ! Comme les composants changent en fonction des collectes, les possibilités pour les couleurs et textures des matériaux sont quasiment infinies !
Transformés, réutilisés, compressés … Les déchets peuvent être des ressources étonnantes ! Le recyclage, mais aussi et avant tout, la conception de produits intégrant une réflexion sur la fin de vie de ceux-ci, sont aujourd’hui une partie de la solution pour préserver notre environnement. À l’image des autres espèces, l’homme essaie aujourd’hui d’innover pour trouver une utilité à tout ce qu’il emprunte à la nature…
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