La carrière de la Malogne est le plus grand réseau souterrain de Belgique, avec 260km de galeries!
Elle fut creusée au 19e siècle pour y extraire le phosphate contenu dans la craie.

Un vrai labyrinthe de roche sur une étendue de 160hectares : c’est sûr, il vaut mieux rester groupés lorsqu’on descend dans la carrière! Et n’avoir peur ni du noir, ni des chauves-souris qui hibernent dans ce lieu éloigné de l’agitation des hommes…
C’est en compagnie de David Stradiot, animateur scientifique à l’ASBL bien nommée la Malogne, que nous avons la chance de découvrir ce trésor souterrain. En 2 heures, cette balade va nous emmener de l’univers de la géologie et de la tectonique des plaques à celui des fossiles, en passant par le monde des chauves-souris ou encore l’histoire régionale et sociale…
La carrière est classée Patrimoine exceptionnel de Wallonie et un dossier pour le classement au patrimoine de l’UNESCO est en constitution.

Du phosphate, pour quoi faire ?

Petit plongeon dans l’histoire : au 19e siècle, la région, qui développe son industrie minière, est en plein boom démographique. Il faut nourrir tout ce monde. On découvre qu’à certains endroits, les cultures poussent mieux qu’ailleurs…précisément là où un affleurement de craie arrive près du sol. Pas n’importe quelle craie, de la craie phosphatée. C’est alors qu’on va creuser des kilomètres de galeries sous terre pour extraire le phosphate contenu dans cette craie : conditionné en sacs, il est vendu aux agriculteurs de la région comme engrais pour leurs champs.
Le travail des « malognards » était très dur, à la limite de l’esclavage, un peu comme dans les mines de charbon voisines, où hommes, femmes et enfants étaient exploités sans distinction.
Les carrières sont restées en activité durant un laps de temps très court : de 1876 jusqu’à la 1e guerre mondiale. Par la suite, d’autres gisements plus rentables ont été privilégiés.
Plus tard, les conditions de température idéale ont été mises à profit pour y créer des champignonnières.

Histoire géologique

Mais les premiers exploitants, en creusant ces galeries, ont ouvert une boîte de Pandore inestimable, qui n’en finit pas de révéler ses richesses et de plonger ceux qui les explorent dans le passé géologique de la région…et finalement de la planète.
Il y a 66 millions d’années, la Belgique était bien plus au Sud… entourée de mers peu profondes. Dans ces mers, vivaient des phytoplanctons capables de réaliser la photosynthèse et possédant une coquille extérieure. Quand ils mouraient, ces organismes se décomposaient, et leur coquille se sédimentait. Ces sédiments se sont accumulés durant plusieurs millions d’années, formant les couches de craie comme on les connaît aujourd’hui. Les parties organiques sont quant à elles devenues des phosphates. Il s’agit donc de roche fossile, comme le charbon, sauf qu’ici, les fossiles sont marins…

Fossiles et autres traces anciennes

L’une des parois témoigne magnifiquement de l’évolution de la planète – que nous n’aurions évidemment pas remarquée sans notre guide spécialisé David Stradiot : la couleur rouille marque la limite KT ou crétacé-paléocène, qui marque la disparition des dinosaures et de bien d’autres espèces…
Plus loin, il nous montre des trous creusés par les crabes, un rostre de bélemnite, l’ancêtre du calamar, et plus loin les traces d’un squelette de hainausaure, de la famille des mosasaures….que l’on perçoit avec un peu d’imagination, et dont le squelette se trouve aujourd’hui au Musée d’Histoire Naturelle de Belgique.
La Malogne fut et est toujours un lieu d’étude passionnant pour les géologues et paléontologues.

Chauves-souris et eau potable

La Malogne, c’est aussi un lieu de mémoire : durant la guerre, les résistants de Ciply, Cuesmes, Hyon, venaient s’y réfugier pour semer l’ennemi dans ce labyrinthe.
C’est un lieu protégé : plusieurs espèces de chauves-souris y hibernent et la Région wallonne procède à un recensement chaque année.
Enfin, c’est une énorme réserve d’eau potable; la SWDE gère donc une partie de la carrière.

Les animateurs de l’ASBL La Malogne proposent des visites guidées en groupe sur demande. Tous les détails sur leur site.